Aurores
Choeur mixte
Poème de Georges Sand
(2010)
Durée : env. 5’
Commande du Cépravoi
Création mondiale le 21 mai 2011 à la Scène Nationale Equinoxe de Châteauroux dans le cadre du Festival de la Voix, par le chœur La Marelle, direction Raphaël Terreau
Editions La Sinfonie d’Orphée
choeur mixte
Le cahier des charges de cette commande du Cepravoi contenait deux contraintes : épouser les images d’un film muet réalisé à partir d’archives de la région Centre, et écrire une partition destinée à un chœur amateur, donc relativement aisée d’exécution. Chacune de ces contraintes, seule, ne pose aucun réel problème ; c’est la réunion des deux qui devient délicate. Car une musique de film (même si elle peut ensuite vivre seule) n’est pas libre : elle doit servir la force suggestive et la logique structurale des images, ce qui induit une mise en mouvement de la matière sonore parfois incompatible avec une grande simplicité d’écriture.
D’autres contraintes se sont imposées naturellement : le support visuel étant lié à un patrimoine humain et régional, il fallait trouver des attaches avec ce patrimoine pour concevoir un discours musical plus intimement liée à son sujet.
Après bien des recherches sur les écrivains ayant un lien avec la région, je m’arrêtais pour le choix du texte à George Sand dont le poème « A Aurore », écrit pour sa fille, correspondait parfaitement à la structure tripartite du film ; George Sand qui, à plusieurs reprises dans ces romans, fait allusion au briolage, cette déclamation si particulière des paysans du Berry pour encourager leurs bœufs. Ainsi le matériau mélodique de la pièce est basé sur des formules caractéristiques utilisées par les brioleurs, et très clairement exposées dans l’introduction.
A une première partie solaire et dynamique s’enchaîne une deuxième plus sombre, plus inquiétante, qui correspond à la procession religieuse amorcée par la statue de la vierge Marie : ce sont des combinaisons de chants grégoriens (Ave Maria, Ave Maris stella, Kyrie, Credo) qui constituent la trame essentielle de cette section toujours pulsée par un rythme de marche et dont l’aboutissement violent correspond au cloutage sur la croix d’un Christ en bois.
Le visage d’un enfant fixe la caméra lorsque le chœur se fige sur le mot «Regarde». Cette troisième partie sera une tournoyante farandole avec retour des formules de briolages et stylisations de roulements de tambours aux voix d’hommes.
Sur le générique de fin, la coda conclusive fait entendre une voix de soprano en vocalise qui prend sur elle la charge nostalgique de ces images de fêtes longtemps oubliées, et aujourd’hui ressuscitées grâce à la magie de la pellicule et de l’évocation sonore ; comme si de nouvelles aurores venaient éclairer un instant les scènes d’un passé endormi.
Patrick Burgan