Oiseau d’éternité

Soprano, mezzo, baryton et 7 instruments (Fl, Sax ou Cl, Fg, Cor,Tpt, Vl, Hpe)
(1993)
Cinq poèmes de Christine Boulanger
Durée : 15’
Création mondiale le 12 juin 1993 à l’ENMD de Montreuil par Caroline Pozderec, Elisabeth Lagneau, Jean-Louis Georgel et des professeurs de l’ENMD sous la direction de Daniel Chabrun – Editions Billaudot
Enregistrement : CD Concours Jolivet (ENMD de Montreuil)

« Perdue en mes yeux… » (extr.) :

L’ordre dans lequel les cinq poèmes sont ici présentés compose les étapes d’une vie de poète, et tout particulièrement celle de leur auteure Christine Boulanger.

La courte pièce introductive est un appel à celui qui sait entendre la voix de la poésie.

La douleur et l’attente pleine d’espoir sont au cœur du deuxième poème dont les imparfaits renforcent la peur de ne pouvoir saisir un idéal fragile, évanescent.

Cet absolu, inaccessible, se laisse entrevoir parfois : c’est alors qu’il pleut sur le ciel une floraison de diamants ; comme dans ce troisième texte, aboutissement lumineux d’une vie d’espoir et de contemplation.

Le chant funèbre du quatrième poème semble nous mettre en garde ; car, quelque forte que soit la pensée, l’enveloppe est bien fragile.

C’est malgré tout une voix tranquille et sereine qui va conclure : la voix de cet oiseau qui a embrassé l’éternité et dont l’ombre – la poésie qu’il a laissée – se tient toujours debout dans la lumière.
Patrick Burgan

 

Poèmes de Christine Boulanger

1.
L’Oiseau chante à qui veut l’entendre
Le ciel s’étend là où le poète ne peut aller
La mer se marie à ceux qui l’aiment

2.
Blessée de ciel et de bateaux
Sous les obus de la lumière
L’océan refoule la terre.

Je t’attendais, vague venue de loin
Ravie aux neiges de l’éternité
Sur mes plages râpées de nuit
Et qu’allonge la langueur de mon regard

Je t’attendais, explosion d’azur que cisèle le vent
Eclatement de sel pour rythmer ma tristesse
Et le cœur de la mer enfoncé dans mon cœur

J’attendais ton instant
De plumes et d’écumes
Pour danser ta vie
Que disperse le ciel…

3.
Le poids des sept couleurs est tombé sur la mer
Et les yeux de cristal ont pleuré de lumière
Sur la crinière d’étoiles d’une vague éblouie
Et ce nuage affolé soudain a souri.

Le vent a dispersé le bruit de ses frissons
Sur les voiles d’un bateau épousant l’horizon
De ces vagues, éternelles messagères de l’imagination.

Il pleut sur le ciel une floraison de diamants
Face à ce sentier d’or où le soleil faseye
Offrant un seul rayon au peintre des merveilles
Pour envoûter la terre d’une auréole qui ment.

Le poids des sept couleurs est tombé sur la mer

4.
Je pourrais me briser au ralenti
Telle une branche de brume
Qui s’assèche d’un gris bleuté.
Il suffirait d’un coup
Entre les deux vertèbres
Pour que je me répande
Transparente et tiède
De ma colonne cassée
Comme un mât de bateau
Arraché par la tempête.
Il suffirait de peu
Pour devenir oiseau d’éternité
En arrosant le monde
De mille coups d’ailes perlés.

5.
Perdue en mes yeux au rêve diffus
Lentement je coule dans le mystère
De mon ombre qu’un rai de ciel ténu
Maintient debout encor vers la lumière