Cristallin
Soprano, contralto et 10 instruments (Fl,Cl,Cor,Tpt,2 perc,Hpe, Alto,Vclle, Cb)
(1988)
Trois poèmes de Christine Boulanger
Durée : 28’
Création mondiale le 25 mai 1988 à à la maison de Radio-France par Nell Froger, Nicole Oxombre et l’ensemble instrumental du CNSM de Paris sous la direction de Pascal Rophé – Editions Billaudot
« Dans 80 ans peut-être… » (extrait) :
- « Soudain tu as rouvert… »
- « Le cœur des poètes maudits… »
- « Dans 80 ans peut-être… »
Les trois poèmes de Christine Boulanger sont la source essentielle de la structuration de l’œuvre, aussi bien comme matériau phonétique que comme catalyseur poétique et dramatique. Le texte doit être considéré comme le moteur de l’idée musicale, les différentes inflexions verbales comme autant de modèles sonores exploités, développés, transfigurés…
L’œuvre est entièrement construite sur une cellule de 4 notes (CHRS – soit do-si-ré-mib – amorce du prénom de la poétesse) qui engendre divers modes, échelles et séries.
Le premier poème, très développé, représente à lui seul la moitié de l’œuvre.
Les atmosphères musicales très diverses qui le constituent sont suscitées par un déroulement narratif riche et ambigu.
Le deuxième est un cri de désespoir et de révolte où le lyrisme rageur du poème est figuré par un traitement instrumental extrêmement acide et contrasté. Les mots sont dissous et comme absorbés par une écriture vocale surtendue qui rend le texte difficilement compréhensible ; texte dont la présence sous-jacente rappelle incessamment la mort, centre névralgique de cette vision violente et fugitive.
Enchaîné au précédent, le dernier poème est tout d’abord lu par les deux chanteuses sur des résonances de cloches. Le texte ne réapparaîtra ensuite que ponctuellement, souvent éclaté, les voix de femmes se fondant le plus souvent sans paroles dans le tissu instrumental.
Animée encore de quelques convulsions passagères, cette troisième pièce résorbe, dans un calme et une sérénité lentement retrouvés, l’énergie dévastatrice du poème central.
Cristallin est dédié à la mémoire de Christine Boulanger (1954-1980) qui nous a laissé quelques merveilleux poèmes ainsi que cette phrase, véritable défi jeté à l’éphémérité de l’existence :
« Jamais n’est mort un jardinier dans la mémoire d’une rose »
Patrick Burgan